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ROBERT FLANE SUR LES GRANDS BOULEVARDS

 

 

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Yves Montand chantait J'aime flâner sur les grands boulevards, y'a tant de choses, y'a tant de choses, y'a tant de choses à voir… Avec les copains, c'était très souvent notre balade quand nous ne savions pas où aller. Nous partions de Belleville et descendions par le faubourg du Temple. Les magasins se suivaient : Prisunic, Dimax, Les Cent Culottes et j'en passe. Passage au métro Goncourt et nous continuions notre descente avec sur la droite le marchand de musique Paul Beuscher. Nous admirions, dans la vitrine, les harmonicas chromatiques Hohner que nous espérions nous acheter bientôt. La guitare n'était pas encore à la mode.

 

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Le magasin vendait aussi des chansons papier et puis des disques 78 tours que nous pouvions écouter avant de les acheter. Nous arrivions au cinéma Le Palais des glaces. Cet établissement devait être un ancien théâtre car il y avait de grandes loges à plusieurs fauteuils. Je me souviens que, accompagné d'une charmante, il suffisait de donner un bon pourboire à l'ouvreuse pour rester seul dans la loge. Il y avait L'Obus, un café à l'angle du faubourg et de la rue de la Fontaine-au-Roi. Après la brasserie La Capitale,  à l'angle du quai de Jemmapes, juste devant la statue de la Grisette, près du canal saint Martin, on traverse et il y a encore un cinéma sur la droite et sur la gauche avant d'arriver place de la République. Puis la caserne à droite, les Magasins Réunis à gauche et enfin la statue de cette vénérable Dame qui a cinq enfants comme le chante Michel Delpech.

 

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C'est le point de départ vers les Grands Boulevards. Il faudrait beaucoup de temps et de talent surtout pour entreprendre la description de ces lieux avec ses innombrables cinémas : le Rex et son ciel étoilé (quelle modernité pour l'époque !), ses théâtres, ses restaurants, ses brasseries, ses boutiques en tous genres, son Musée Grévin, sans oublier aux moments des fêtes de Noël les petites baraques où l'on vendait mille choses. Et la porte Saint Martin, la porte Saint Denis, avec sa rue Blondel, très renommée à une certaine époque… Je me souviens très bien, c'est juste au début, il y a une brasserie, Le Balthazar, où jouait l'orchestre Deprince, un grand monsieur de l'accordéon. Les établissements où il y avait un orchestre, il y en avait pas mal et pour tous les goûts : musique classique, légère, populaire, et même du jazz.

Nous allions jusqu'à Opéra et revenions par le même chemin. Nous accostions les jeunes filles qui s'enfuyaient en riant et en se moquant, quitte à nous attendre quelques centaines de mètres plus loin. C'était alors le début d'une longue conversation entre garçons et filles qui finissait parfois fort bien.

 

 

 

Dans l'armée en Algérie (1949-1950, la situation était relativement calme), je me suis le plus souvent trouvé avec des gars natifs de la province et parfois même de la campagne. Des gars qui n'étaient souvent jamais allés dans une grande ville et encore moins à Paris. Ceux-là, connaissant mon origine, me demandaient le soir après le couvre-feu quand nous étions tous allongés sur notre lit, attendant l'esprit rêveur que le sommeil vienne enfin, ils me demandaient de leur décrire ce chemin qui allait de la République à l'Opéra en leur détaillant chaque boutique ou établissement. Je dois dire que contrairement à aujourd'hui, je savais tout cela dans le détail. Et alors le miracle s'accomplissait comme par enchantement. Tous écoutaient dans un profond silence mon récit et malheur à celui qui cédait au sommeil accompagné d'un ronflement bienheureux, il recevait à tous les coups un godillot sur le coin de son nez. Je continuais. Ils étaient curieux de tout sur les filles… Jusqu'à l'instant où, du fond de la chambrée, certainement un parisien, fusait un "Ta gueule la Gostagne, tu nous fous le cafard ! " Je m'arrêtais mais je savais qu'un autre soir ils en redemanderaient. Je ne leur en voulais pas. J'en ai vu qui pleuraient. Ils pensaient à leur chez eux et à cette ville inconnue qui les faisait rêver. Robert

 


 

Commentaires

  • Bonjour Robert,
    Je lis toujours vos textes avec grand plaisir.
    A propos des magasins du Faubourg du Temple,je me souviens très bien des "Cent Mille Chemises", mais j'ignorais qu'il existait aussi les "Cent Culottes" !
    Je suis allée très récemment dans ce secteur, rue Ramponneau, boulevard de Belleville, faubourg du Temple, etc.. Certes tout a bien changé, mais c'est toujours aussi vivant. Quant aux grands boulevards,abandonnés à une certaine époque, il semblerait qu'ils soient à nouveau plus fréquentés.
    Cordialement, Lucile.

  • Chère Lucile, (j'aime ce joli prénom)
    Vous m'avez créé un doute et en même temps cela me fait rire, maintenant que je me relis, je suis presque assuré que les "cent culottes" n'ont existés que dans ma confusion, mais cela est certainement dû à mon côté révolutionnaire…Vous avez raison, ce sont "les Cent Mille Chemises"
    C'est plaisant de se dire que quelqu'un, quelque part vous lit, avec attention. Merci chère Lucile et à bientôt. Robert

  • Ma chère Lucile. Je n'ai pas fait confiance à ma mémoire et j'ai eu tort. Depuis votre commentaire et ma réponse trop hâtive, quelque chose trottinait dans ma tête et me gênait, alors j'ai fait appel à cet outil génial le NET, j'ai cherché longtemps et grâce à l'accueil de la mairie du 11° de Paris qui m'a dirigé sur la Chambre de Commerce et d'Industrie de Paris une personne très aimable m'a donné en quelques secondes le renseignement recherché. Je vous le livre:

    Magasin "Aux Cent Culottes" 108, rue du faubourg du Temple. Paris 11°
    Sté. GUIBEL-SARL n° registre du commerce: 375 063 008. radiée le 19/09/1995
    Formidable, hein!

  • Bravo Robert !
    Vous n'êtes pas seulement mémorialiste, mais également fin limier.
    "La rue du Pressoir" dispose donc maintenant de son propre "Rouletabille" et nous ne pouvons tous que nous en réjouir !
    Bon week end de Pentecôte.
    Bien cordialement, Lucile

  • Bonjour à tous.

    c'est excellent Robert ! merci de nous donner toutes ces précisions !

    Bien cordialement

    Nicole

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