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  • JOSETTE FARIGOUL SE SOUVIENT

     

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    Le side-car des week-ends

     

     

    Dans quelles années êtes-vous né ?

    Josette Farigoul :1948

    Quelle est la rue de vos premiers pas dans le vingtième arrondissement ?

    J.F.: Rue du Pressoir

    Quel est votre plus lointain souvenir de Belleville-Ménilmontant ?

    J.F.: C'est un 14 juillet, tous les cafés diffusent de la musique, les gens dansent dans la rue du Pressoir, je suis très jeune et je danse la Raspa sur la chanson de Jacques Hélian, le Bal à Doudou. Au son de la musique, en sautillant, je lance une jambe après l'autre avec les deux mains sur les hanches, puis je tourne. Maman m'a toujours dit que j'avais 4 ans et même si je trouve que c'est bien jeune pour se souvenir, je me revois très bien sur le trottoir devant l'entrée du 23/25. Encore maintenant, cette chanson trotte toujours dans ma tête.

    Quelles sont les images (façades d'immeubles, commerces, manèges, que sais-je ?) qui vous reviennent le plus souvent lorsque votre enfance vient vous chatouiller la mémoire ?

    J.F.: Mon immeuble et ses murs gris, la cour de l'immeuble et son matelassier, ma mère à sa fenêtre, je pars pour l'école et lorsque j'arrive dans la cour, je lève la tête et je lui fais un signe de la main. Je revois, souvent, la boutique de Madame Gilles ; j'ai passé, dans cette boutique, une bonne partie de mon enfance. Des images, aussi, de la fête foraine sur le Boulevard de Belleville, je sais que nous nous rendrons à cette fête en famille et tenterons de gagner, à la roue de la loterie, 1 kilo de sucre ou un paquet de café, peut-être 1 litre d'huile. Je revois mon père s'exercer au tir, nous aurons droit à un tour de manège et tout en redescendant le Boulevard de Belleville, je croque à pleines dents cette pomme d'amour que j'attendais. Sur ce boulevard flotte, dans l'air, un doux parfum, mélange de barbes à papa, pommes d'amour et cochons en pain d'épices. Les odeurs de notre enfance.

    Qu'est-ce qui a amené vos parents à s'installer dans le vingtième arrondissement ?

    J.F.: Très bonne question mais je ne sais pas, du moins pour Maman puisqu'elle habitait déjà cet immeuble avant la guerre. La tante de mon père se trouvait au 2ème étage, ma mère au 3ème et c'est lors d'une visite chez sa tante, à la fin de la guerre, que mon père rencontra ma mère, veuve depuis un temps, seule avec ma soeur aînée Monique. Ce fut la naissance d'un nouvel amour, mes parents avaient 29 ans, mon père s'installa rue du Pressoir. Une rencontre, probablement, arrangée par la tante Angèle et jamais démentie par ma mère.

    Que faisaient vos parents (métiers et loisirs) ?

    J.F.: Maman était serveuse dans un restaurant Italien pendant la guerre, ma soeur aînée n'a pas souffert de la faim durant cette période, ses patrons lui donnaient ce qu'il fallait et même du chocolat pourtant rare en cette période. Maman s'arrêta de travailler dès ma naissance en 1948 puis, sont arrivées mes deux autres soeurs, Ghislaine et Martine, en 1953 et 1955. Par la suite, ma mère s'arrangea pour trouver du travail à domicile afin d'améliorer les conditions difficiles de la vie. Mon père débuta seul dans la vie dès l'âge de 13 ans, tout d'abord en apprentissage de boulangerie-pâtisserie puis de cuisinier, le service militaire durant trois ans et, sans être démobilisé, un départ pour la guerre dans les corps francs. Que de temps perdu ! A la suite de cela, il reprit son métier encore quelques années avant de se reconvertir dans l'électricité. Mes parents faisaient en sorte, malgré tout, de profiter de la vie, de recevoir des amis avec d'interminables parties de cartes, des ballades et des pique niques et ce vieux side-car qui nous trimballait dans les bois d'Ozoir-la-Ferrière au moment des jonquilles, du côté de Coulommiers cueillir du muguet pour le revendre au 1er mai, sans oublier l'été, les vacances à la mer direction Berck-Plage. Nous en avons fait de belles ballades avec ce side-car ! Nous étions, tous, heureux.

    Quelles écoles de quartier fréquentiez-vous ?

    J.F.: L'école de la rue Etienne Dolet, du CP au Certificat d'études puis une année au Collège technique et commercial de la rue de l'Elysée- Ménilmontant, un passage éclair, la comptabilité ne me plaisait pas, la sténo encore moins et la dactylographie pas plus. Il ne me restait plus qu'une solution, travailler. Mes parents manquaient d'argent, alors je me suis mise au travail, j'ai donné ma paye jusqu'à mon mariage à 20 ans. Le comble dans tout cela, c'est que je fais de la comptabilité depuis 36 ans, cette comptabilité que je détestais et que j'ai dû apprendre par moi-même.

    Où (rue, passage, impasse, cour, square ...) alliez-vous jouer ?

    J.F.: Les parents ne laissaient pas sortir les jeunes enfants. Malgré tout, vers 8/10 ans, de temps en temps, j'avais l'autorisation de jouer dans la cour et un peu plus tard, juste devant l'entrée de l'immeuble, sur le pas de la porte. Il ne fallait pas faire de bruit car il était interdit de jouer dans la cour ou dans le couloir. Avec mon copain Roland, nous nous retrouvions dans l'escalier, assis sur les marches ; nous discutions de tout et de rien, j'allais aussi jouer chez lui ou il venait chez moi. Aux mardi-gras, nous nous déguisions, c'était super, il ne nous fallait pas grand chose pour être heureux.

    Qu'évoque pour vous la rue du Pressoir ?

    J.F.: Cette rue évoque mon enfance, mon adolescence et les copains, la rencontre avec mon mari, la vie difficile de mes parents, de la tristesse en pensant à ces parents qui me manquent toujours terriblement, des joies et des peines, des sourires lorsque certaines situations un peu cocasses remontent à la mémoire mais aussi des larmes en pensant à d'autres souvenirs plus douloureux et laissant un goût amer, comme touchée en plein coeur. Mais il faut apprendre à s'arranger avec le passé. Lorsque ce passé ressurgit, systématiquement, ma mémoire me ramène rue du Pressoir.

    Que se passe-t-il dans votre coeur et votre tête lorsque vos pas vous mènent rue du Pressoir aujourd'hui ?

    J.F.: Difficile cette question. Lorsque mes pas me mènent rue du Pressoir, bizarrement, j'ai le coeur sec et la tête vide. Je ne reconnais rien et pour cause, il ne reste plus rien  à l'exception de la courbe. A la place, des cubes gigantesques  sans âme et sans grâce, une rue du Pressoir anonyme et ennuyeuse.  Tout cela à cause de politicards sans scrupules.

     

     

     

     

  • DE LA RUE DU PRESSOIR A BERCK PLAGE


    La famille Idoux arrive à la mer
    par
    Bienvenu Merino

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    De la voiture au side-car

    Dans les années 1880, les constructeurs d’automobiles hésitèrent longuement entre la vapeur et l’électricité pour actionner leurs moteurs. Finalement, ce furent l’essence et le moteur à explosion qui prévalurent, parce qu’ils étaient plus pratiques pour les longues distances. En 1891, sous licence Daimler naquit la première voiture à essence française, Panhard et Levassor. En 1894 s’effectuait  la première course automobile Paris-Rouen que gagna une De Dion-Bouton à vapeur. Le code de la route naquit en France en 1899.
    Dans le 20e arrondissement de Paris, rue du Pressoir, la famille Idoux habitait aux numéros 23-25 dans un bel immeuble, mais cependant sans grand confort et sans que les propriétaires sous influence de l’état ne veuillent faire le nécessaire pour rénover les appartements. Mais en août, la famille Idoux partait en vacances, à Berck Plage : le side-car, la mer, le soleil, les copains… Pour notre amie Josette, le rêve ! Comme certains parisiens, monsieur Idoux était un féru de motocyclette et plus tard de side-car. Et là alors, adieux les soucis, le travail, bonjour la vie. Partir en vacances avec ses trois filles et son épouse : un régal !
    1905 vit apparaître la première ligne d’autobus à moteur Saint-Germain-des-Prés/Montmartre et le taximètre automobile. Les fiacres, bien que modernisés sur pneumatiques et dotés du dernier confort, même de chaufferettes en hiver, ne survécurent pas à cette concurrence et disparurent un à un. L’électricité vaincue sur la route par le moteur à essence prévalut au contraire pour les chemins de fer souterrains. A la fin du siècle dernier, l’ingénieur breton Fulgence Bienvenüe construisit la première ligne de métropolitain Vincennes-Maillot. Elle fut inaugurée le 19 juillet 1900, pendant l’Exposition Universelle. Avant de triompher, le métro avait rencontré bien des oppositions. Les cochers de fiacre le prétendant insalubre l’avaient baptisé le « nécropolitain ». A la Chambre, un député l’accusa même d’être « antipatriotique et attentatoire à la gloire de Paris ! » Il est vrai que, à l’origine, les projets de métro aérien proposés défiaient parfois l’imagination et l’esthétique. Enfin, la modération l'emporta, les Parisiens apprécièrent leur métro, ses stations de faïence blanche et ses bouches aux grilles évanescentes de pur moderne style.
    Le trafic fluvial sur la Seine allait bon fleuve. Les chalands et les péniches croisaient, les fameux bateaux-mouches, qui font encore la joie des touristes après avoir desservi la ligne régulière Pont-d’Austerlitz/Viaduc d’Auteuil. Ils avaient été créés en 1866, à la veille de l’Exposition Universelle, afin de succéder aux coches d’eau. Passée la floraison fantaisiste des voitures artisanales de tous genres et de tous styles, à deux, trois ou quatre roues, la production automobile se normalise en atteignant le stade industriel après la guerre de 1914. Dans les années 20, le cycle-car livra le dernier assaut des voiturettes, perdu d’avance. Le succès de cette ingénieuse curiosité n’eut qu’un temps. A la recherche de lignes aérodynamiques triomphaient déjà de belles voitures comme les Bugatti, Delahaye, Hispano-Suiza.
    1934 vit l’apparition de la traction avant Citroën, tandis que la loi des quarante heures et les congés payés de 1936 lançaient sur les routes la triplette et le tandem. C’est de cette époque que date l’exode estival des Parisiens. Monsieur Idoux n’attendit pas très longtemps pour se fabriquer ingénieusement, lui-même, son propre side-car en forme de noix, derrière comme devant. Formidable cocon familial, pour réunir sa petite famille au complet et essayer de vivre heureux son amour !

     

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    La famille Idoux en voyage